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Enthousiasme

jeudi 17 octobre 2013

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L’édito de Jacques Cheminade

Nous sommes parvenus à un moment de notre histoire où domine un sentiment de désarroi, de pessimisme politique et de colère sourde. Les commentaires abondent sur notre « société de défiance » dans laquelle, selon le sondage Ipsos « France 2013 », 78 % des Français pensent qu’ « on n’est jamais assez prudent quand on a affaire aux autres » . Le vote de Brignoles reflète ce sentiment. Il faut sortir de ce cul de sac, sans quoi nous ne serons plus capables d’une réelle résistance face aux politiques d’austérité économique et sociale qui détruisent la substance de notre avenir.

Nous devons retrouver l’enthousiasme si nous voulons reprendre en main notre destin. Cela doit se manifester d’abord en négatif, en ne tolérant plus ce qui est inadmissible au regard des principes fondateurs de notre République et de notre Constitution, à commencer par les droits sociaux inscrits dans son Préambule. Idéalisme ? Oui, mais bien plus : exigence de mettre en œuvre les promesses faites après 1945 et qui n’ont pas été tenues. A Rome, près de 40 000 personnes se sont rassemblées pour exiger ce respect de la loi fondamentale, qui là-bas comme ici rappelle que « tous les citoyens ont une même dignité sociale et sont égaux devant la loi » .

On ne peut continuer à accepter que la logique de mondialisation financière impose le démantèlement social et répande l’injustice et la mort. Les noyés de Lampedusa ne sont que l’image de ce qu’on a laissé faire. La destruction économique et sociale de la Grèce, du Portugal, de l’Espagne et de l’Irlande est la mesure de l’abandon du pouvoir à des prédateurs financiers. L’Europe s’en est fait le relais, trahissant ainsi son âme. Chez nous, on multiplie les réflexions sur l’avenir (commissariat Gallois, prospective avec Pisani Ferry, 34 plans pour la nouvelle France industrielle de Montebourg, 7 secteurs stratégiques à l’horizon 2030 de Lauvergeon), sans cohérence entre projets et surtout sans se donner les moyens financiers de les appliquer. Au contraire, Pierre Moscovici s’est soumis aux folies financières des banques universelles et le projet de Loi de finances, dans son Article 60, ôte aux collectivités territoriales le pouvoir de recourir à la justice pour se protéger de leurs emprunts toxiques ! Le renoncement à la taxe de 1 % sur l’excédent brut d’exploitation parce que le patronat « a préféré une autre formule » , plus favorable aux « gros » du CAC 40, est la dernière expression de cette dérive. M. Moscovici, qui affirme que sa jeune compagne est « plus à gauche que lui », ajoute que « ce n’est pas difficile »…

A droite, Laurent Wauquiez, qui préside le courant « La droite sociale » au sein de l’UMP, nous dit qu’ « il faut avoir le courage de remettre en question le droit du travail » . Fermez le ban de la trahison de nos principes fondateurs. Nous devons dire « non » de toutes nos forces à cette dérive destructrice, contraire à l’engagement de tous les mouvements qui ont constitué le Conseil national de la Résistance.

Dire simplement non, cependant, serait demeurer impuissant. Il faut se battre pour un futur et retrouver l’enthousiasme dans ce combat, cet enthousiasme positif que Lazare Carnot définissait comme « l’amour du beau » et Jean Jaurès comme « la volonté de gagner les terres inconnues du progrès » . C’est ici que science, art et justice sociale se rejoignent pour former une unité dans un projet politique. Sans cela, la faiblesse des partis et du syndicalisme et le fatalisme qui gagne entraîneront une jacquerie sociale sans horizon, et donc autodestructrice. La nécessaire révolution est tout autre chose, « l’éveil et le développement de l’esprit, par la connaissance de ce qui est beau et le culte de ce qui est bon » , dans un projet de vivre en commun sans compromis destructeur.


L’édito de Jacques Cheminade est publié tous les 15 jours dans le journal Nouvelle Solidarité.


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