La France avec les yeux du futur

Un grand chantier pour demain
Un monde sans la City ni Wall Street

Nous sommes en guerre. Un conglomérat d’intérêts financiers opérant depuis la City de Londres et Wall Street domine le monde. Sa loi est le profit à court terme, la possession, la cupidité et le saccage social.

J’avais dénoncé ces intérêts au cours de ma campagne présidentielle de 1995 et annoncé la crise mondiale qu’ils allaient fatalement provoquer. J’avais ouvert des pistes pour sortir du dilemme. Mon compte de campagne a été alors rejeté de façon ignominieuse par le Conseil constitutionnel, tandis qu’il approuvait ceux de MM. Chirac et Balladur. Depuis, malgré les calomnies et les poursuites engagées à mon égard par un Etat dévoyé, je n’ai cessé de me battre pour dire la vérité et tenter d’inspirer un sursaut.

Aujourd’hui, la crise que j’annonçais s’est produite.

Le féodalisme financier que dénonçait et combattait le programme du Conseil national de la Résistance est de retour. Notre crise dépasse par ses dimensions celle de 1929 et portera avec elle, si nous n’y mettons pas immédiatement un terme, des orages bien pires. Nous sommes au bord du gouffre.

Car les fondements mêmes de notre vouloir vivre en commun, entre nations et au sein de chacune d’entre elles, sont en train d’être ravagés. Non pas par des armées constituées ou des milices s’efforçant de conquérir des territoires, mais par un empire monétariste mondial qui avilit et contraint les esprits. L’Europe qu’on nous fait depuis les années soixante-dix du XXe siècle constitue le relais de cet empire, dont la France est devenue un pion.

Aujourd’hui, la pyramide de capital fictif accumulé au sein du système s’effondre. Ceux qui ont émis de l’argent sans contrepartie productive et au détriment de la justice sociale sont comme l’équipage d’un bateau ivre cinglant vers les récifs. Ils détruisent le fondement même sur lequel reposent leurs intérêts, car pour eux, le gain à court terme fait dans l’ombre prime sur tout, aux dépens de tout.

Cet effondrement est un terrible risque si l’on demeure passif, une occasion unique de rendre le monde meilleur si l’on mobilise ses énergies pour combattre.

Un projet ou un programme politique, s’il doit avoir un sens, doit partir de ce diagnostic. Or aucun parti ou responsable politique de notre pays ne le fait, du moins clairement. La plupart sont insérés dans ce système où s’est déroulée leur carrière, dans la France des réseaux et des carnets d’adresse. La minorité qui s’y oppose le fait négativement, sans présenter d’alternative. Car le « repli national », la « démondialisation » ou « rendre le pouvoir au peuple » sont autant de réactions aux effets du système, sans vision claire du bien commun et sans projet réel pour reconstruire. Les droites gèrent les peurs comme s’il était impossible de changer de système, les gauches cultivent les humiliations en donnant l’illusion qu’on peut changer la vie en le corrigeant et l’extrême gauche se complaît dans l’idée seule de l’anéantir. Je me bats au contraire pour l’alternative, qui est de bâtir une économie physique au service de l’homme, inspirée par une culture de la découverte et de la vie, sans asservissement monétariste ou chauvinisme autodestructeur.

C’est un grand chantier pour le futur qu’il faut ouvrir, fondé sur les capacités créatrices de l’homme, et non sur le désir d’être reconnu par le système existant ou la tentation d’une haine aveugle envers ceux qui simplement le représentent. Un monde où ces capacités créatrices seront respectées est un monde radicalement incompatible avec la loi financière de la City et Wall Street, avec la tradition des empires romain, byzantin, vénitien, britannique et anglo-américain. Les valeurs vitales ne peuvent se réaliser que contre cette oligarchie, mais au-delà d’une révolte, pour un travail en commun de recherche, d’innovation et d’équipement de l’homme et de la nature, en mettant en œuvre des technologies toujours plus productives par unité de surface et par individu. Assurer ainsi au monde un avenir est la seule voie pour retrouver le respect d’autrui et l’estime de soi. C’est cette porte que nous devons ouvrir pour notre jeunesse, avec la réalisation en commun de grands projets de développement et la joie partagée d’un enseignement aux frontières de la connaissance.

Il n’est pas, il ne peut y avoir de justice sociale dans une société où la science ne fournit pas les moyens de faire vivre davantage d’êtres humains, où la société d’aujourd’hui ne sert pas les générations de demain.

Nos ennemis, qui sont les ennemis du genre humain, ne s’y trompent pas. Ils promeuvent une politique malthusienne de dépopulation par tous les moyens, par l’incitation et par la force, car ils savent que leur système monétariste ne peut faire vivre la population mondiale, même au niveau actuel. C’est pourquoi leur politique est criminelle. C’est pourquoi, aussi, ceux qui refusent l’essor et l’application des capacités créatrices de l’homme se font leurs complices ou leurs idiots utiles.

Sortir du monde de la City et de Wall Street ne signifie pas sortir du nucléaire, mais au contraire, le développer en le réinsérant dans une progression continue vers des formes de production d’énergie de plus en plus denses, permettant d’aménager la nature pour nourrir plus d’êtres humains, parvenir à un développement mutuel à l’échelle de la planète et ouvrir la porte des voyages dans l’espace. L’oligarchie de la Renaissance était opposée à la création de Républiques sur un continent nouveau et elle s’efforça de les anéantir ; de même, celle d’aujourd’hui s’oppose à une politique de l’espace impliquant un développement des connaissances humaines qui aboutirait au rejet de sa domination destructrice et irrationnelle.

Affirmer cette cohérence entre une politique de justice sociale et une ardente obligation de développement culturel, scientifique et technologique est la raison de mon engagement dans la campagne présidentielle.

Le modèle ultra-libéral que nous subissons aboutit à créer un ordre social à deux vitesses, avec une minorité d’emplois bien payés dans les activités financières et une masse d’emplois très faiblement rémunérés, en particulier dans les services à la personne et la grande distribution. Le retour du féodalisme financier a ainsi conduit au retour d’une forme nouvelle de domesticité comme au XIXe siècle, accompagnée d’un asservissement par le chantage à la dette. C’est de cela qu’on doit sortir si l’on veut rétablir une société voyant et agissant avec les yeux du futur et créant des emplois qualifiés et motivants en vue de ce futur.

Les atouts de notre pays sont notre natalité plus élevée qu’ailleurs en Europe, notre politique de santé publique, des systèmes de transport et de télécommunications avancés, des enseignants et des chercheurs de premier plan, le nucléaire, l’aérospatiale et l’automobile. Sachons jouer sans complexe ces atouts des Trente Glorieuses. Le service public sera au cœur de ma campagne pour les défendre, en animant une éducation dès les maternelles et le primaire qui offre à chacun les moyens réels d’être le meilleur pour participer à la société de l’avenir, où tous pourront trouver un emploi à la hauteur d’une exigeante qualification.

Pensons par delà l’Europe et le monde transatlantique au monde Pacifique qui vient, dans lequel nous pouvons jouer un rôle avec l’Allemagne, à condition de mener une politique de co-développement de l’Atlantique à la mer de Chine en y faisant participer le monde africain et méditerranéen. C’est ce que nous avons appelé un Pont terrestre eurasiatique, avec une Europe de l’Atlantique à l’Oural et une Eurasie de l’Atlantique à la mer de Chine.

Il serait désastreux que nous abandonnions le printemps des peuples sans lui fournir les moyens d’arriver en été, et que nous-mêmes, en Europe, passions de l’automne à l’hiver.

Ma campagne vise donc à être un défi et un réveil, préparant dès aujourd’hui une relève de la garde.

La nouvelle présidence pour laquelle je me bats impose en effet un nouveau gouvernement, composé de femmes et d’hommes dont les convictions soient cohérentes avec ce que je viens de dire. On ne fait pas une politique nouvelle avec des personnes ayant appliqué une politique ancienne, surtout lorsque cette dernière a fait faillite. On ne fait pas la guerre avec les généraux qui ont vécu et commandé dans le confort douteux d’une mauvaise paix. On ne remotive pas la jeunesse (80 % des 18-24 ans n’ont pas participé aux dernières élections locales) avec des « bourgeois bohèmes » blasés. On ne bâtit pas l’avenir avec ceux qui ont prospéré dans une société de connivences et de privilèges, dévoyée par le corporatisme et la corruption des élites. On ne dirige pas une France qui a manqué à ses valeurs avec les responsables de ces manquements.

La démondialisation dont parlent certains est ambiguë car nous sommes entrés dans une économie-monde dont nous ne pouvons sortir. Il faut redéfinir la mondialisation en la définanciarisant, en revenant à un esprit de grands projets réalisés en commun par les Etats et en rétablissant la souveraineté nationale de chacun en vue de l’émission de crédits en faveur de ces projets communs. Un système de crédit productif public pour des investissements à long terme doit ainsi prendre la place du monétarisme fondé sur le profit à court terme. L’Etat républicain doit revenir aux commandes pour l’imposer contre l’oligarchie et retrouver son rôle inspirateur, animateur et instigateur en nous faisant jouer la partition du progrès. C’est cela le grand chantier pour le futur.

Faute de l’ouvrir, nous nous détruirions nous-mêmes.

La France ne peut, bien entendu, parvenir seule à le lancer. Elle peut cependant en être un catalyseur, à condition de combattre sans compromissions les oligarchies et, au besoin, en pratiquant la politique de la chaise vide. Il ne faut pas craindre d’avoir raison tout seul, si les autres ont tort ensemble. Notre chance est grande, d’autant plus qu’il se constitue en Russie, en Chine et aux États-Unis, autour du rejet de la présidence d’Obama et de ses tuteurs britanniques, une alliance du Pacifique qui peut aller dans cette direction. Qu’elle aboutisse dépend du travail de mes amis dans ces pays, et tout particulièrement aux États-Unis. La France, avec l’Allemagne et quelques autres nations européennes, doit peser dans ce sens, vers un accord anti-financier d’États-nations ayant suffisamment de poids pour rejeter la tutelle monétariste et les menaces de l’Empire.

La France n’appartient pas qu’aux Français. La France appartient au patrimoine de l’humanité, elle en est un point de référence. Sa grandeur et son rayonnement sont aujourd’hui tombés bien bas depuis que la droite a trahi l’esprit du gaullisme et la gauche l’héritage de Jaurès. A nous de la relever, pas seulement pour nous-mêmes, mais pour le bien commun des vivants et des générations à naître.

Nous n’avons pas le choix car nous sommes en guerre et, comme dans toute guerre, la survie de l’idée que nous nous faisons de l’homme dépend de notre victoire.

Ma campagne vise à organiser cette victoire en éveillant les forces latentes de notre pays. Elles sont là, je le sais, nous le savons.

Nous devons à la France cet éveil. Nous devons au monde un projet de civilisation.