La France avec les yeux du futur

Une mobilisation générale pour la jeunesse

Les pouvoirs publics, les organisations politiques, les syndicats et les entreprises doivent se mobiliser pour la jeunesse. Notre pays est en train de la perdre. Nos jeunes sont parmi les plus pessimistes et les plus anxieux des pays occidentaux. Ma politique générale vise à leur rendre un avenir. Par delà, cependant, en partant des constats que l’on doit faire aujourd’hui, des mesures spécifiques d’aide à l’insertion dans la vie publique s’imposent.

 1) Le constat :

  • Chômage : 22,8 % des 15-24 ans sont chômeurs (40 % dans les zones sensibles), contre 9,9 % pour l’ensemble de la population.
  • Pauvreté : plus d’un million de jeunes de 18 à 28 ans vivent sous le seuil de pauvreté (moins de 950 € par mois), soit 21 % de cette classe d’âge.
  • Inégalités de formation : chaque année, il y a 15 % d’illettrés à la sortie du primaire, 150 000 jeunes quittent l’école sans aucun diplôme du second cycle ni qualification réelle et plus de 100 000 étudiants quittent l’enseignement supérieur sans diplôme ou sans qualification reconnue sur le marché du travail.
  • 17 % des actes de délinquance sont le fait de mineurs.
  • 15 % des jeunes cumulent au moins trois troubles : consommation régulière de substances psycho-actives, fugue, dépressivité, tentatives de suicide.
  • 4 % d’une génération seulement, la part issue des grandes écoles, tient les commandes de la société.

Il est donc clair que des mesures s’imposent à tous les niveaux. Créer simplement des « emplois jeunes », sans en définir les qualifications ni l’assurance de les conserver, n’est pas en soi une solution en période de crise comme la nôtre. Enfin, une allocation d’autonomie moyenne pour tout étudiant ou jeune en formation n’est qu’un sparadrap sur un corps malade si l’on ne guérit pas tout le corps. C’est un plan d’ensemble cohérent qui est nécessaire.

 2) Dès le plus jeune âge

Il est désastreux d’exclure de fait les très jeunes des maternelles, avant 4 ans, et de ne pas accroître considérablement le nombre de crèches. Les dépenses effectuées dans ce domaine, comme dans les autres touchant à la jeunesse, si elles sont intégrées dans un tout cohérent, sont non seulement morales, mais sources de gains à venir en fournissant à une nation en développement les esprits individuels et la vie en commun qui lui seront nécessaires.

Je me battrai donc pour :

  • doubler en dix ans le nombre d’enfants dans les structures collectives ;
  • imposer un taux minimum de places en crèche pour les regroupements de communes de plus de 10 000 habitants ;
  • que les maternelles puissent prendre en charge les enfants dès deux ans, sur tout le territoire, y compris dans les DOM-TOM ;
  • soumettre les établissements publics et privés sous contrat à des objectifs de mixité sociale.

 3) Santé, alimentation et surveillance à l’école et au-delà

  • Des infirmiers doivent être constamment à l’école, avec au moins un à temps complet et un médecin trois fois par semaine pour 500 élèves ;
  • Les soins dentaires et des yeux seront gratuits pour les moins de 10 ans ;
  • Les surveillants doivent être réembauchés en nombre suffisant : 1 constamment présent pour 50 élèves ;
  • Des petits-déjeuners doivent pouvoir être servis aux élèves dont la famille ne peut les assurer ;
  • Il faut se concentrer très en amont, très vite, sur les 15 % d’ados ou pré-ados qui connaissent des difficultés psychologiques auxquelles s’ajoutent le plus souvent des problèmes sociaux. Les communes, avec une aide publique, doivent être en mesure de leur désigner des « compagnons de route » (adulte, éducateur, psychologue) soutenant le travail des RASED, dont il ne faut en aucun cas diminuer le nombre de postes.

 4) Conditions de vie pour les 18-25 ans

Diverses solutions ont été proposées. Il est nécessaire de les adapter : la France, où les minima sociaux commencent à 25 ans et où le nouveau RSA jeunes ne touche qu’une très faible minorité (ceux qui ont travaillé deux ans et au moins 3214 heures au cours des trois dernières années) fait figure d’exception en Europe.

Je ferai mettre en place :

  • une allocation d’insertion pour tous les primo-demandeurs d’emploi d’un montant égal au RSA-socle, relevé à 600 € ;
  • une allocation d’études pour tous les jeunes s’élevant à l’équivalent de 450 € par mois sur 36 mois, sous forme d’un capital utilisable tout au long de la vie mais seulement pour financer la vie étudiante, articulé avec un système de prêt sécurisé à taux zéro organisé par les pouvoirs publics, pour la même somme (équivalant à 450 € par mois sur 36 mois) et remboursable uniquement si le revenu d’activité après la formation dépasse un seuil mensuel de 2500 €. Cette possibilité de vivre avec 900 € par mois, montant auquel il faudra également faire remonter le minimum vieillesse, permettra à tous les jeunes d’étudier à plein temps sans devoir trop travailler par ailleurs, ce qui contribuera à la démocratisation des études. La part du capital sera modulée sous condition de ressources.

J’ajoute que soutenir les jeunes individuellement et pas les familles est plus égalitaire, car la solidarité familiale favorise chez nous la reproduction des inégalités sociales et culturelles. Si l’on aide les aînés, l’argent ne redescend pas équitablement les générations.

Ces allocations, d’un coût d’environ 15 à 20 milliards d’euros au maximum, se substitueront aux aides familiales et aux bourses actuelles et à une partie de la formation professionnelle (8 à 10 milliards). Le coût financier net en sera donc à court et moyen terme de 5 à 10 milliards, pour un bénéfice économique réel bien supérieur à moyen et long terme. La solidarité entre les générations vaut bien cet effort.

La gestion des allocations sera confiée au réseau de missions locales, qui ont l’expérience d’un travail d’écoute et d’accompagnement des jeunes en difficulté professionnelle. L’on devra accroître le nombre de postes d’accompagnateurs, car cette fonction est prioritaire.

 5) Formation

La section éducation de mon projet traite de l’ensemble du sujet. Cependant, trois initiatives me paraissent essentielles pour aider les jeunes exclus du système :

  • Renforcer les écoles de la deuxième chance. Il n’y en a qu’à peine quatre-vingt-dix actuellement, offrant environ 10 000 places, qui procurent des formations courtes, indemnisées et personnalisées. Elles devraient être triplées (2 à 3 par département en moyenne) et toucher plus de 25 000 jeunes. Je m’engage à accroître fortement l’aide publique pour ces écoles, permettant aux collectivités territoriales de les organiser, en liaison avec les chambres de commerce et d’industrie ;
  • Créer partout où cela sera nécessaire, notamment dans les zones urbaines et péri-urbaines sensibles, des internats scolaires de proximité, créant un environnement de travail assisté pour les jeunes en difficulté. Il s’agit d’une démarche complétant celle des internats d’excellence actuels, pour lesquels des élèves prometteurs sont sélectionnés sur dossier dans leur école ;
  • Les Epide (établissements publics d’insertion de la défense), qui reçoivent aujourd’hui 2200 jeunes socialement désinsérés, doivent être renforcés, et la possibilité de choisir un service civique, étendue. Les dispositifs coûtent cher, et un pilotage général plus clair s’impose sur le sens à donner aux missions, mais ce n’est pas une raison pour les laisser dépérir.

 6) Esprit et objectif de notre enseignement

Notre enseignement (cf. pour plus de détails ma section L’éducation, une nouvelle frontière) ne doit plus être élitiste, préparant la majorité à devenir salariés consommateurs dans des emplois de service et une petite minorité grands patrons ou administrateurs.

Je me battrai d’abord sur quatre fronts :

  • Rétablir la formation d’enseignants dans des centres pédagogiques, avec une année de formation comme dans les anciens IUFM, mais par des formateurs n’ayant pas passé plus de quatre ans sans enseigner ou enseignant encore ;
  • Fournir des avantages en logement et en traitement aux enseignants chevronnés nommés dans des écoles difficiles ;
  • Encourager la responsabilisation des élèves par la participation à leur vie scolaire, en particulier vis-à-vis de leur salle de classe, avec le soutien d’une aide réellement individualisée ;
  • Redonner à l’université sa place dans notre enseignement supérieur, en ne la laissant plus être la sœur délaissée des grandes écoles qui, elles, devront redevenir des centres de formation scientifique à la frontière des connaissance, c’est-à-dire le fil de l’épée de notre enseignement, et ne plus être les bases d’opérations d’une élite d’administrateurs fiers d’eux-mêmes et de leur carnet d’adresses, mais bien plus héritiers que créateurs.

 7) Embauche

  • Les entreprises qui bénéficient d’aides publiques doivent ouvrir leurs portes aux jeunes, sous peine de pénalités financières à insérer dans le dispositif global de mobilisation pour la jeunesse ;
  • Les autres entreprises devront, selon la proposition de François Hollande, retenir leurs salariés les plus âgés et les plus expérimentés pour assurer le tutorat de jeunes recrues, avec une aide publique sous forme d’un allègement des charges patronales.
  • Les jeunes agriculteurs doivent pouvoir obtenir des terres : l’on créera des groupements fonciers qui leur loueront obligatoirement, selon la proposition du CNJA.

 8) Culture

Nos jeunes ont moins souffert, statistiquement, que leurs prédécesseurs. Ils ne sont que plus brutalement désorientés par le monde de la crise et la culture de la mort qui l’accompagne. Michel Serres l’a exprimé très crûment :

« Ils sont formatés par les médias, diffusés par des adultes qui ont méticuleusement détruit leur faculté d’attention en réduisant la durée des images à sept secondes et le temps des réponses aux questions à quinze secondes, chiffres officiels ; dont le mot le plus répété est "mort" et l’image la plus représentée celle de cadavres. Dès l’âge de 12 ans, ces adultes-là les forcèrent à voir plus de 20 000 meurtres. »

Ils sont également formatés par la publicité, la société du spectacle et du « tchat ». Ils connaissent et écrivent autrement.

Il est donc urgent de faire trois choses :

  • fournir à notre jeunesse une culture de la vie et du savoir, qui soit cohérente avec mon projet pour l’avenir. Le défi est de le faire avec les nouvelles technologies et les nouveaux moyens d’expression qui, pour l’instant, sont une source d’appauvrissement et de déstructuration de la réflexion, mais qui peuvent devenir source d’une nouvelle Renaissance pour tous. Faute de comprendre cette jeunesse, les générations qui n’ont pas encore pris leur retraite multiplient les réformes inutiles, car elles ne s’adressent pas à l’essentiel et s’appliquent dans un univers financier en peau de chagrin. Mon projet est au contraire de redonner à la jeunesse la science et l’art à la source, en leur fournissant les œuvres originales de ceux qui écrivirent et composèrent sous une forme qu’internet permet de mettre à la portée de tous (cf. ma section Opération Lagrange-Malraux pour sauver les jeunes et la culture, vite !) ;
  • interdire, avec l’accord de représentants de nouvelles générations, les jeux vidéo violents : peut-être les partisans de cette interdiction d’une culture de la mort sont-ils aujourd’hui une minorité, mais nous l’étions aussi pour interdire la peine de mort et, au moins en cela, nous avons réussi ;
  • promouvoir les projets comme Demos qui, en enseignant la musique classique aux enfants de 7 à 12 ans dans des quartiers sensibles et les aidant à gagner en concentration, confiance en soi et sens de l’universel, poursuit l’œuvre d’El Sistema au Venezuela.

Le grand poète anglais Wordsworth écrivait, à propos de la Révolution française, « le bonheur, en cette aube, était de vivre » . Ce rêve a mal tourné faute de culture politique du peuple et du poids de l’oligarchie européenne liguée contre lui. Aujourd’hui, notre défi est de réussir – avec les jeunes des autres peuples du monde.