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Croissance

mercredi 24 avril 2013

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Entretenue par l’oligarchie financière dominante et ses médias, la plus grande confusion règne dans le domaine de l’économie. L’on propose des « réformes » qui sont autant de leurres. Les uns disent qu’il faut fatalement rembourser nos dettes et pour cela, se soumettre à ce que M. Hollande appelle maintenant une « rigueur raisonnable », que d’autres voudraient transformer plus vite en austérité. On peut « vivre mieux sans croissance », répond Alternatives Economiques. Le piège se referme : ce qui se trouve masqué est ce qui rend le système financiarisé dominant destructeur et la nature du travail oppressive.

La vérité est que la financiarisation mondialisée, dont les centres se trouvent à la City de Londres, à Wall Street et dans les paradis fiscaux, détruit la substance même de l’économie et la qualité du travail humain. Le travail se trouve déporté hors du secteur productif, vers les secteurs de services financiers et commerciaux, l’industrie délocalisée vers les pays à bas salaires et l’informatique mise au service de la baisse des coûts et du harcèlement à domicile. Informatique et finance associées dissocient le réel et font perdre le sens du travail concret, leur combinaison créant une universalisation réduite à la perception des sens et à des désirs fatalement insatisfaits.

La notion même de propriété se trouve morcelée par la titrisation, qui transforme le bien en l’agglomérant à d’autres biens pour en faire des conglomérats négociables, et dissociée par les produits dérivés, avec lesquels on joue sur le prix futur de la chose et non sur le bien tangible lui-même. Les titres se négocient sur des marchés de moins en moins réglementés avec des durées de possession de plus en plus courtes. L’économie devient ainsi un système de pillage financier dans lesquels les biens sous-jacents ne sont plus qu’un prétexte à organiser les paris. Les mots mêmes se trouvent dégradés : on ne dit plus « cotisations sociales », mais « charges », comme si le travail était un coût correspondant à des charges, et non ce qui permet à une société de vivre et de s’améliorer.

Le système produit ainsi du capital fictif, en pillant l’homme et la nature au lieu de favoriser leur équipement. Parler de croissance ou de décroissance n’a dès lors aucun sens dans ce monde où les dés sont pipés. Les partisans de la « croissance » mélangent dans les produits intérieurs bruts croissance physique, réelle, et produits de jeux financiers et commerciaux qui sont, eux, de vraies « charges » ! Et les partisans de la « décroissance » confondent le financier qu’il faudrait anéantir et le physique nécessaire aux générations futures. Quant à la « dette », celle des jeux de casino illégitimes doit être annulée. Une seule dette a un sens : celle que nous avons contractée envers les générations passées et que nous devons acquitter envers les futures, sous forme de technologies, éducation, santé publique, recherche et logements. Cela suppose un travail qui ne soit plus une tâche répétitive mais un travail cognitif, explorant les domaines par lesquels l’homme crée.

La vérité est que l’économie consiste à développer les capacités du travail humain, en reprenant le pouvoir de création monétaire abandonné au système bancaire privé et en revenant à un ordre de crédit public productif. Pour ouvrir la porte à l’émission de ce crédit, il faut d’abord éliminer les dettes illégitimes : c’est le but d’une séparation bancaire stricte, qui consiste à nettoyer les écuries d’Augias avant d’investir pour le futur. Pour une vraie croissance, pas son simulacre – une vraie croissance sans laquelle il ne peut y avoir d’emploi, de hausse du pouvoir d’achat, de sécurité sociale et de paix par le développement mutuel.

Jacques Cheminade

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