Face à la crise qui secoue le monde, les dirigeants politiques de notre pays ne sont capables que de gérer leur image médiatique, s’adapter au démantèlement de la production et s’efforcer de verrouiller le système au sein duquel évolue leur carrière. En détruisant autour d’eux et en se détruisant eux-mêmes faute de vision et de projet.
Ce qui est arrivé à François Hollande au Salon de l’agriculture est un exemple de ce comportement. Voici un Président de la République apparaissant au Salon dès potron-minet, accueilli par deux rangées d’agriculteurs, le long d’une allée, lui tournant le dos et portant leur malheur sur leurs blouses : « Je suis éleveur, je meurs. » Au lieu d’entamer le dialogue, l’équipe présidentielle fait donner sa police (au moins autant de CRS que d’éleveurs) et repousser violemment les manifestants, qui se heurtent à la horde de journalistes et, pris entre deux feux, huent et sifflent, les plus désespérés répondant aux coups. Le chef de l’Etat a ainsi saisi une occasion de descendre encore plus bas dans les sondages. Quant aux autres dirigeants des partis en place, responsables au départ, par action ou omission, du démantèlement de notre agriculture, ils se sont pavanés au Salon, l’ultralibéral et ex-ministre dérégulateur Bruno Le Maire remportant le pompon de la feuille de présence auto-satisfaite.
Un ancien secrétaire général de l’union départementale de la CGT du Rhône s’est vu, lui, renvoyé devant la Cour d’appel de Grenoble par notre plus haute instance judiciaire, la Cour de cassation, pour avoir organisé une distribution de tracts à un péage d’autoroute. La Cour a ainsi jugé qu’une simple distribution de tracts devient illégale si elle n’est pas préalablement déclarée en préfecture. C’est le parquet, représentant la justice d’Etat, qui a poussé la procédure jusqu’au bout afin d’obtenir cette décision liberticide. Haro sur la liberté syndicale, ont répondu en écho les magistrats de la Somme, en condamnant à deux ans de prison, dont neuf mois fermes, les anciens salariés et syndicalistes de Goodyear Amiens-Nord, pour avoir enfermé sans violences leurs supérieurs pendant 30 heures, peine sans précédent pour des faits semblables ou bien plus graves.
A Calais, la préfète a fait détruire les abris de fortune dans lesquels vivaient plusieurs milliers de migrants, sous les jets de grenades lacrymogènes, les cris et les mouvements de foule. L’Etat ne sait répondre que par la violence à un problème qu’il a lui-même créé. Xavier Bertrand peut bien dire qu’il faut annuler l’accord du Touquet, il appartenait cependant, en 2003, à la majorité qui l’a signé, acceptant de faire de notre pays le bras policier de la politique migratoire britannique. En même temps, l’Union européenne abandonne à leur sort la Grèce et les réfugiés qui s’y trouvent, laissant se rétablir des frontières intérieures en son sein et des policiers de divers pays membres venir assister leurs collègues macédoniens pour repousser les arrivants.
Concernant le droit du travail, Hollande et Valls ont choisi de plafonner les indemnités dues en cas de licenciement abusif, ce qui revient à émasculer le CDI. Comme Emmanuel Macron l’a dit dans son interview au Journal du Dimanche du 28 février : « Les CDI sont trop compliqués à rompre. » Macron, avec le gouvernement qu’il représente, va ainsi au devant du souhait exprimé par la banque JP Morgan Chase le 28 mai 2013, qui était de faire changer les lois votées après la victoire contre le fascisme, en imposant des mesures d’austérité à des peuples rétifs avec des textes plus « adaptés aux circonstances ».
Le drame vécu par nos producteurs de lait ou de viande porcine et bovine s’inscrit ainsi dans un ensemble. Notre tract est une réponse à cette politique de mépris du travail humain et de délinquance économique légalisée, adoptée depuis plus de quarante ans. Alors, se demander si Manuel Valls va partir ou Nicolas Sarkozy revenir frise l’idiotie criminelle face à la nature du défi.