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Le concept de LaRouche pour le nouveau paradigme

mardi 7 février

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Intervention de Jacques Cheminade, président de Solidarité & Progrès, lors de la visioconférence de l’Institut Schiller du 4 février 2023.

Nos dirigeants occidentaux agitent un étendard sur lequel ils ont écrit le mot guerre. S’ils n’en mesurent pas bien les conséquences, ce n’est pas une excuse car, tel l’odieux « joueur de flûte de Hamelin », leur musique barbare menace de nous précipiter du haut de la falaise dans l’anéantissement nucléaire.

La guerre : ils ont exprimé à plusieurs reprises leur intention, ils ne la cachent pas. Je ne citerai ici que l’amiral Robert Bauer, président du Comité militaire de l’OTAN depuis juin 2021 : « Nous sommes prêts pour un affrontement direct avec la Russie. »

Il ne s’agit pas seulement des élucubrations d’Annalena Baerbock, officiellement ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne (là encore depuis 2021), ou du ministre français de l’Économie Bruno Le Maire, mais des règles surgies du cerveau dérangé du monstre à cinq yeux (« Five eyes ») de l’oligarchie mondiale de l’OTAN.

Cela signifie une « économie de guerre » : donner la priorité à certaines matières premières et installations nécessaires à la production militaire plutôt qu’à la production civile. Regardons les choses en face, son vrai nom est une « culture de la mort », comme le pape Jean-Paul II l’a identifiée un jour en tant que tendance, qui devient aujourd’hui réalité.

C’est à cela que nous devons faire face et c’est pourquoi cette session s’intitule « Le nom de la paix : une nouvelle architecture de sécurité et de développement économique ».

Nous venons de différentes parties du monde et de différentes institutions qui se sont engagées non seulement à arrêter la guerre mais aussi à construire une architecture de paix, basée sur des principes, pour éradiquer les racines de la guerre.

Helga Zepp-LaRouche a condensé en « dix principes » le travail de toute sa vie, afin de nous tirer du sommeil de la raison qui engendre les monstres à l’œuvre aujourd’hui. Nous devrions réfléchir à la cohérence de ces principes et agir en fonction d’eux, car dans le moment historique que nous vivons, si nous nous abstenons d’agir, nous devenons les collaborateurs du mal, comme Martin Niemöller nous en avertit dans son poème « Quand ils sont venus chercher… ».

Trahisons

Dans la guerre qui se déroule en Europe de l’Est, les Ukrainiens se font massacrer. Les pays membres de l’OTAN ont trahi leurs promesses faites après la chute du mur de Berlin de ne pas étendre leur présence aux frontières de la Russie.

Angela Merkel, François Hollande et Petro Porochenko ont trahi les accords de Minsk, laissé les régimes ukrainiens bombarder le Donbass et organisé à dessein la militarisation de l’Ukraine sous tutelle anglo-américaine. Poutine n’a alors eu d’autre choix stratégique que d’intervenir. En acceptant la fatalité comme leurs prédécesseurs européens l’avaient fait à l’été 1914, les puissances d’aujourd’hui marchent vers la guerre comme des somnambules.

Ce processus doit être arrêté par la diplomatie et non par l’envoi d’armes de plus en plus meurtrières. C’est le juste engagement à prendre, mais s’il l’on s’en tient à cette vision étroite, on commet une erreur de composition. Nous devons considérer la situation dans son ensemble.

Une oligarchie financière et militaire internationale, ce que notre ami Ray McGovern appelle le MICIMATT, le complexe militaro-industriel dénoncé par Dwight Eisenhower en 1961, s’est transformée depuis en une entité belliciste qui gouverne non seulement les États-Unis mais tout « l’Occident ». Il s’agit d’une entité intrinsèquement vouée à la guerre. En témoigne le nom donné à la salle où les diplomates des pays de l’UE sont formés « à oublier leurs racines nationales », à Bruges, en Belgique. Cette salle porte le nom de Madeleine Albright, la femme qui a déclaré aux journalistes que la mort de 500 000 enfants irakiens innocents était le prix à payer pour une guerre nécessaire et juste !

La bête oligarchique dévore ses propres enfants

L’image globale, depuis au moins les guerres coloniales du Royaume-Uni et de la France, et la guerre des États-Unis au Vietnam, est celle d’une traînée de sang, de l’Afrique à l’Amérique latine, au Yémen, à la Syrie, à l’Afghanistan, menant à notre moment historique actuel.

La bête oligarchique dévore ses propres enfants : en Allemagne, plus de 40 % des enfants de parents isolés vivent dans la pauvreté et plus de 7 millions de citoyens français ont recours à une aide alimentaire, environ 20 millions en comptant leurs familles. Pire encore, reconnaissant que leur mouvement mondial va vers la guerre, une récente étude de la Rand Corporation dit en substance que mener une guerre longue contre la Russie n’est pas la meilleure idée pour les États-Unis, car la vraie guerre se fera contre la Chine.

Se débarrasser de toute cette ordure une fois pour toutes est ce qui définit notre défi, pour nous, dans le ventre du MICIMATT. Pour nous, armés de notre proposition de nouvelle architecture mondiale de sécurité et de développement basée sur les dix principes d’Helga Zepp-LaRouche.

Lyndon LaRouche avait anticipé la nécessité d’un tel changement de cap, qu’il condensa dans ses écrits de 2005, Earth Next Fifty Years, nous exhortant à aller « au-delà de Westphalie » :

Comme je l’ai déjà dit en d’autres occasions, le monde a atteint un stade de développement où la poursuite de la vie civilisée sur cette planète exige de rejeter les folles expériences de la soi-disant ‘mondialisation’, en faveur d’un système d’États-nations souverains ayant développé entre eux une forme de coopération planétaire, que l’on décrirait plus justement comme la réalisation des objectifs et principes implicitement contenus dans ce traité de Westphalie de 1648... 

En gros, il s’agit d’établir un nouveau système monétaire répondant au principe du Traité de Westphalie, renouvelé en fonction des circonstances actuelles et de leurs défis. Une juste estimation de la situation suffit à suggérer qu’en prenant de telles mesures de progrès, dans le contexte de l’effondrement total d’un système monétaro-financier mondial en voie d’autodestruction, nous devons reconnaître que nous sommes embarqués dans une démarche implicite de réorganisation générale du monde, une réorganisation dont la phase initiale prendra pas moins de deux générations, au vu des exigences de la société moderne et de sa technologie, soit une cinquantaine d’années. »

La part cruciale, et la plus importante, de la nouvelle formation de capital dans l’infrastructure économique de base, sera un capital international associé à des accords de traité à long terme entre États-nations souverains. La durée de cette masse de nouveau capital s’étendra sur un quart ou un demi-siècle, comme dans le cas de la participation de l’Europe au développement des actifs chinois. Cela confère une nouvelle profondeur au principe de ‘l’avantage de l’autre’ contenu dans le traité de Westphalie de 1648. 

L’enjeu, souligne LaRouche dans l’introduction de son livre, c’est la créativité humaine :
« Le terme ‘créativité’ apparaît dans la pensée économique européenne comme le principe prométhéen : la découverte et la connaissance de l’utilisation par l’homme de principes physiques universels ayant pour effet d’augmenter la densité relative potentielle de population de l’humanité, et la production physique nette par habitant et par kilomètre carré de surface terrestre. »

Ferment de grève de masse

Bien sûr, pour rassembler suffisamment de forces pour mener notre combat pour la paix, nous ne pouvons pas attendre que tous les combattants aient atteint ce niveau de compréhension. Le fait est qu’en commençant à se battre pour la bonne cause, sachant que « l’homme est fondamentalement bon et capable de perfectionner à l’infini la créativité de son esprit et la beauté de son âme », l’espoir permet d’accomplir des miracles dans un ferment de grève de masse tel qu’il se dessine actuellement.

En France, nous avons une mobilisation générale de travailleurs, de vieux syndicalistes qui manifestent pour leurs retraites et pour la paix, une majorité de généraux et de colonels à la retraite, dégoûtés par la boucherie qui menace l’Europe et par la transformation de l’OTAN en Alliance offensive, des boulangers, des commerçants et des artisans en colère contre l’arrogance du gouvernement et de l’oligarchie dirigeante – formant un bloc populaire bon et prometteur, une coïncidence des opposés que notre mission est d’unir et d’éduquer à des formes d’engagement de plus en plus élevées pour l’avenir de notre nation et de l’humanité. Ils comprennent que nous vivons un changement d’époque et nous demandent des références, qu’il s’agisse de la Nouvelle Route de la soie de la Chine, de ce qui se passe en Amérique latine ou de la raison pour laquelle la Russie ne s’effondre pas et l’Europe occidentale ne se développe pas.

Victor Hugo

Permettez-moi de terminer par un poème de Victor Hugo, écrit en écho à son intervention au Congrès mondial de la paix de 1849, où il avait appelé à la « fraternité universelle naissante de tous les hommes » pour « défricher le monde, coloniser les déserts, améliorer la création ».

Il a pour titre « Sonnez, sonnez toujours, clairons de la pensée ». C’est l’histoire de Josué marchant autour de Jéricho :

Sonnez, sonnez toujours, clairons de la pensée

Quand Josué rêveur, la tête aux cieux dressée,
Suivi des siens, marchait, et, prophète irrité,
Sonnait de la trompette autour de la cité,
Au premier tour qu’il fit, le roi se mit à rire ;
Au second tour, riant toujours, il lui fit dire :
« Crois-tu donc renverser ma ville avec du vent ? »

Après trois autres tours, sans plus de succès, il poursuit :

« À la sixième fois, sur sa tour de granit
Si haute qu’au sommet l’aigle faisait son nid,
Si dure que l’éclair l’eût en vain foudroyée,
Le roi revint, riant à gorge déployée,
Et cria : " Ces Hébreux sont bons musiciens ! "
Autour du roi joyeux riaient tous les anciens
Qui le soir sont assis au temple, et délibèrent.

À la septième fois, les murailles tombèrent. 

Notre musique joue la belle partition du miracle à venir, pourvu que nous répandions l’esprit tenace de Josué.


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