Ted Stanger, un journaliste américain vivant en France depuis 1966, vient de publier successivement deux livres : Sacrés Français et Sacrés Français, le roman. Cette publication est révélatrice d’un état d’esprit que l’idéologie néo-conservatrice s’efforce de répandre en France.
Alors que la candidature Merkel-Kirchhof a été promue par ces mêmes milieux en Allemagne, chez nous ils appellent à une « réforme radicale » pour faire sauter le verrou de l’Etat social. Tietmeyer, Miegel et von Lambsdorff s’insurgent outre-Rhin contre les mesures sociales héritées de Konrad Adenauer, qui empêchent le marché de devenir le « gendarme de la société ». Ecoutons ce que Ted Stanger a à dire sur les Français : « Ils vivent encore très bien mais voguent sur le Titanic (...) Les Français sont des drogués du loisir (...) La France est le dernier pays soviétique. » Et à la question : « Quelle est la première mesure que prendrait un Américain ? », il répond : « Il brûlerait le Code du travail (...) Aux Etats-Unis, personne n’a de contrats, sauf les stars de cinéma. On est licenciable du jour au lendemain avec un taux de chômage de 5% (...) Oui, il faut laisser travailler les Français, baisser la fiscalité et arrêter d’embaucher des fonctionnaires. » Bref, du Sarkozy, mais avec le mérite d’une clarté brutale !
Ces conceptions viennent tout droit de la société du Mont-Pèlerin et, en particulier, des écrits de Friedrich von Hayek. Pour lui, « l’idée d’économie de marché est incompatible avec celle de justice » et « la seule responsabilité sociale du chef d’entreprise est de maximiser les dividendes des actionnaires, tout autre comportement de sa part étant à considérer comme subversif ». Le modèle von Hayek a été successivement expérimenté dans le Chili de Pinochet, la Grande-Bretagne de Thatcher et l’Amérique de Reagan-Bush. Aujourd’hui, c’est ce qu’on veut imposer à l’Europe avec un axe Sarkozy-Merkel-Blair : l’objectif est de privatiser tous les éléments constitutifs de l’identité nationale et de réduire les impôts sur les revenus et les profits élevés. Bref, imposer sans retenue la loi de l’oligarchie financière.
Dominique de Villepin n’est pas un néo-libéral « hayekien », comme Nicolas Sarkozy. Cependant, sa réforme des impôts profite aux contribuables les plus aisés, il n’a pas de politique de logement social et privatise les autoroutes et les services publics. Les socialistes n’ont pas de réelle alternative à cet ordre-là et les gauchistes ne proposent aucun projet de société cohérent.
Aussi, en Allemagne comme en France, ce que nous représentons, avec notre conception de l’économique physique, est unique parce que nous sommes aux antipodes du modèle Pinochet-Mont Pèlerin-Merkel-Sarkozy. « Le destin de l’Allemagne est en jeu : l’Etat social ou la destruction bushiste », écrit Helga Zepp-LaRouche dans son dernier tract. Puissions-nous faire en sorte que Katrina, les élections allemandes et un réveil français soient le Waterloo de George W. Bush, de Dick Cheney, des idéologues qui les contrôlent et de leurs alliés européens.