Paris, le 3 février 2011 – En s’engageant à présenter à nos deux Assemblées l’inscription dans notre Constitution du « principe » d’un équilibre budgétaire pour l’ensemble des administrations publiques, Nicolas Sarkozy se soumet à la loi des marchés financiers, du FMI et de la City. En effet, il s’agit d’une règle et non d’un principe, qui ne relève en rien d’un ordre constitutionnel, et son application livrerait notre économie pieds et poings liés au monétarisme dominant.
Tout d’abord, la Constitution ne doit pas incorporer des règles particulières concernant la politique budgétaire de l’Etat, au risque de devenir un fourre-tout, mais s’en tenir à de vrais principes. Celui énoncé dans son article 2 – « un gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple » – se suffit à lui-même. Le reste doit en découler.
Ensuite et surtout, l’équilibre budgétaire dans l’ordre monétariste actuel correspond à un étranglement de l’Etat, d’autant plus que celui-ci s’endette dans des buts clientélistes et pour maintenir un système financier destructeur. Il ne lui resterait donc rien pour faire son vrai métier, c’est-à-dire alimenter l’économie et équiper l’homme et la nature. Pour le faire, c’est à un système de crédit productif public qu’il nous faut revenir, animé par une banque nationale et reposant sur le principe d’une séparation entre banques d’affaires d’une part et banques de dépôt et de crédit d’autre part. C’est ce principe, connu sous le nom de Glass-Steagall, qui est essentiel et qu’il serait urgent de faire adopter par nos deux Assemblées, et non celui d’un équilibre financier, qui ne pourrait être atteint au sein d’un ordre monétariste dans lequel le réservoir fuit de toutes parts, sauf au prix d’une austérité sociale sans précédent.
En fait, ce que veulent le président de la République et ceux qui le soutiennent, c’est conserver l’ordre monétariste actuel en imposant cette austérité sociale, et en jouant leurs amis spéculateurs contre l’économie productive de plus en plus soumise à leur loi.
Il est aussi clair que Nicolas Sarkozy veut accuser ainsi le PS de « ne pas vouloir mettre d’ordre dans les finances publiques » et s’en prendre « à la gestion laxiste des collectivités locales ». Cet opportunisme politique, au moment où nous traversons l’une des pires crises de société et de civilisation de l’histoire, est pire qu’un crime, une idiotie.
Il est enfin révélateur que cette décision du Président vienne après la réunion de la commission présidée par Michel Camdessus, l’ancien directeur général du Fonds monétaire international. Il s’agit de l’aveu d’une orientation politique aujourd’hui partagée entre MM. Sarkozy et Strauss-Kahn, le successeur de M. Camdessus.
Je dis donc : Glass-Steagall, crédit productif public et retour de l’Etat républicain, et non équilibre budgétaire, ordre monétariste et austérité sociale imposée par une oligarchie. Sur le mur de la caverne politique, cela s’écrit : ni Sarkozy, ni Strauss-Kahn, une même politique conduisant au désastre, même si les couleurs sont apparemment différentes.